(Billet 388) – La DGessaime sur la Corniche de Casablanca

(Billet 388) – La DGessaime sur la Corniche de Casablanca

Il y a quand même quelque chose d’étrange au royaume du Maroc, autoproclamé plus beau pays du monde… Il semblerait que les lois ne soient pas faites pour tout le monde, ou ainsi du moins le considèrent certaines personnes. Faut-il le rappeler, le pays vit une vigoureuse vague d’un virus aussi petit que teigneux, et l’application de la loi se heurte à la résistance de certains clans, aussi nantis qu’hargneux.

Tant que la police sévit dans les quartiers populaires et les zones populeuses, tout va pour le mieux, mais quand la DGSN essaime dans les quartiers plus huppés, alors on pousse des cris d’orfraie. Y aurait-il donc une différence entre Cabestan et Arabistan, entre les fortunés Darbistes et les infortunés Hayistes, entre les plages bondées et les stations balnéaires guindées ?  La loi ne serait-elle donc pas la même pour tout le monde ?

La maréchaussée entre dans un quelconque café d’un quelconque quartier, où les clients sont proches les uns des autres. Elle sévit, elle verbalise, elle disperse… les réseaux sont heureux. La même maréchaussée déboule dans un restaurant étoilé avec des clients plus ou moins éthyliques, demande le port du masque entre deux gorgées et dans les espaces communs, et c’est le scandale sur les réseaux ! Sacrés flics… ne savent-ils donc pas, ces malheureux, qu’il ne peut y avoir de virus là où se trouve Bacchus ? Passionnant débat médico-philosophique…

Ils ont pourtant fait leur job, tout simplement, en entrant dans plusieurs cafés et restaurants de la Corniche casablancaise, là où prospère la faune nocturne de la ville. Mais ils ont été copieusement vilipendés sur les réseaux spécieux, pour avoir exigé que les gens portent leurs masques et respectent une distance physique acceptable. « Ils se sont mal comportés », « ils étaient agressifs », « ils ont arrêté tout le monde », et le reste à l’avenant. La meilleure, commise par un gérant de restaurant casablancais qui a déclaré humblement : « Nous avons donné à manger aux hôpitaux et à la police pendant le confinement ». Hideux.

Voilà donc des gens bienpensants, défendant en tous lieux la veuve et l’orphelin, pourfendant par tous les temps les abus et se dressant autant contre les barbus… qui refusent que la police fasse son travail dans une ville qui regroupe près de la moitié des cas actifs de Covid. Ces mêmes gens qui exigent que les gouvernants respectent le droit et les lois, qui montent aux créneaux pour exprimer leur attachement aux libertés et qui grimpent aux rideaux dès identification d’un dérapage lié à la sécurité.

Il est loin le temps où le policier était l’ennemi, il faut le dire et le répéter… où le policier avait la gifle facile et le coup de pied agile. Le policier est aujourd’hui un professionnel, généralement jeune gardien de la paix, et très souvent gradé ultra-diplômé. Il remplit sa tâche, dans le respect de la loi, d’une façon que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. Et si dérapages il y a, et il y en a, ils sont à chercher ailleurs, chez les donneurs d’ordres, dans d’autres organes ou organismes…

Avec leur effectif étriqué de quelques 70.000 fonctionnaires pour une population de 35 millions d’âmes, les policiers ont assuré l’application et le bon respect des règles de l’état d’urgence sanitaire et du confinement, jour et nuit, sans relâche, depuis six mois, se faisant tantôt caillasser, tantôt harasser par une population aussi différente dans les modes de vie que convergente dans la critique de cette police.

Alors que nous avons vu la brutalité de la police espagnole en Catalogne, des hommes de Didier Lallemant à Paris, des pistoleros américains qui tirent plus vite que leur ombre sur les Afro-Américains et les Hombres, quel mal y aurait-il à ce qu’un officier de police vous demande de porter un masque et vous verbalise, un peu énervé, de 300 DH en cas de refus d’obtempérer ? Nous traînons un héritage épigénétique sur la police marocaine qui, entretemps, a changé. Il nous appartient également, au nom du civisme que nous réclamons et du respect du droit que nous exigeons, de changer aussi.

Et en cas d’abus, les téléphones aujourd’hui filment et enregistrent plus qu’ils n’appellent…

Aziz Boucetta

 

 



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