(Billet 23) - Accès à l’information… circulez, il n’y a rien à (sa)voir !

(Billet 23) - Accès à l’information… circulez, il n’y a rien à (sa)voir !

Ce qui est bien au Maroc, c’est que ses lois sont belles comme un écran plasma, et exhaustives comme le Jugement dernier. Mais il faut néanmoins savoir les lire, et ça, ça fait moins rire. Ainsi donc de la loi sur l’accès à l’information, qui a mis cinq longues années pour naître, et qui est toujours en couveuse. L’Etat n’aime semble-t-il pas fournir l’info, et encore moins dire ce qu’il fait, comme il faut.

L’information est une nature. On l’a, ou on ne l’a pas. Nos Chers Leaders Politiques campent à l’évidence dans la seconde catégorie. Ecoutez-les parler et vous saurez… Ils croient dur comme fer à la langue de bois, pour éviter des volées de bois vert. Jadis, en France, Jean-Pierre Chevènement avait dit qu’ « un ministre, ça ferme sa gueule ou ça s’en va ! ». On pourrait penser que sur nos terres, et à l’exception peut-être du volubile Lahcen Daoudi, les ministres ne veulent pas s’en aller, car ils ne causent ni ne glosent, se contentant de prendre la pose.

Puis ils se sont réunis en conclave ministériel et ont bruyamment cogité, pour concocter cette belle loi 31-13 qui donne aux citoyens le droit d’accès à l’information. Ça, c’est le titre de la loi… Dans la réalité, c’est tout autre chose. Un article 7 énumère en effet les exceptions au droit à l’info. Plein de trucs sujets à plein d’interprétations… Ce 7 est clairement destiné à effrayer le fonctionnaire, et c’est réussi ! Allez demander une info quelque part et vous verrez… et il y a d’autres articles aussi, avec des phrases à double fond et une prose à triple bande.

Le législateur a ainsi tout fait et tout imaginé pour que l’accès ne rime pas avec excès. Ainsi, les délais de recours et de contestations de refus sont à étages, et chaque étape prend entre 20 et 30 jours. Les temps changent, la vitesse aussi, mais pas le législateur, et sa mollesse non plus…

Au final, le fonctionnaire rétif à partager des informations n’encourt que des sanctions administratives, et encore… « sauf dans le cas où sa bonne foi est établie ». Qui établit la bonne foi ? La hiérarchie, sans doute, car ce n’est pas mentionné dans la loi. Et pour le fonctionnaire qui violerait le 7, c’est le bagne. A l’inverse, le quémandeur encourt des peines de prison explicites s’il enfreint à ses obligations, une fois son info obtenue. Obligations ? Oui, comme « nuire » à l’administration qui lui a fourni les infos. C’est quoi « nuire » ? Le procureur vous le dira, certainement en détention préventive…

Autrement dit, citoyens, votez s’il vous plaît… puis partez ! Ce qui suit ne vous concerne pas. L'info est sacrée, dit-on... On ne la donne pas à n'importe qui...

Aziz Boucetta



Articles Similaires



Les plus populaires de la semaine

Vidéos de la semaine




Newsletters