(Billet 287) – Othmane Benjelloun et Aziz Akhannouch l’ont fait… à qui le tour ?

(Billet 287) – Othmane Benjelloun et Aziz Akhannouch l’ont fait… à qui le tour ?

Le 30 juin 2011, nous plébiscitions une constitution, avec un article qui évoquait tellement Armageddon que nous l’avions alors chouiya ignoré. Il s’agit de l’article 40, qui dit ceci : « Tous [les citoyens] supportent solidairement et proportionnellement à leurs moyens, les charges que requiert le développement du pays, et celles résultant des calamités nationales et des catastrophes naturelles ». Il est temps de le relire, lentement, la main à la poche…

Lors d’une épidémie, les gouvernements prennent des décisions drastiques, voire dramatiques, en matière de santé publique et de prévention. C’est ce que fait le Maroc, et il le fait bien. On sent du sérieux et de l’engagement et on en ressent même une certaine fierté. Mais une fois ces mesures prises et mises en place, l’économie, l’entreprise et le social en pâtissent inévitablement. Il est donc nécessaire de passer à la seconde phase de l’action, plus économique, plus financière.

Décision a donc été prise pour la création d’un fonds spécial de lutte contre le coronavirus, doté de 10 milliards de DH. Le budget décidé est important, certainement suffisant pour la gestion sanitaire et médicale de la pandémie en cours. Mais si on intègre l’économie, cela ne suffira pas à couvrir les besoins. Qu’est-ce que l’économie ? Les PME qui s’effondrent, les chaînes d’approvisionnement qui se rompent, les emplois qui se perdent, le moral des ménages qui dégringole et la crise qui s’envole… On s’intéresse aux personnes physiques atteintes, contaminées ou décédées, et c’est tout aussi naturel qu’humain, mais il faut également se soucier des personnes morales dont la disparition impactera les personnes physiques.

Il faut contribuer à l’effort de solidarité nationale ! Riches et moins riches, salariés ou professions libérales, entrepreneurs ou agriculteurs… Tout le monde doit pouvoir exprimer sa solidarité sonnante et trébuchante. Othman Benjelloun l’a fait, avec un milliard de DH. Aziz Akhannouch l’a également fait, avec un milliard de DH. Au suivant… chantait Jacques Brel.

A tous ceux auquel le Maroc a hier et aujourd'hui permis d’accumuler des richesses, d’investir en paix, de faire fortune, il appartient aujourd'hui plus qu'hier de contribuer à aider. Banquiers fortunés, promoteurs immobiliers aisés, assureurs prospères, opérateurs téléphoniques richissimes, rentiers de tous bords et souvent à tort (ils se reconnaîtront…) … tous doivent mettre la main à la poche, piocher dans leurs fortunes et renforcer le fonds national créé. On dit certes que le capital est lâche, mais il peut certainement lâcher de l'argent.

Le Maroc vit une période particulière, à l’instar de tant de pays dans le monde. Cette occasion sera peut-être celle d’une réconciliation générale de la société, passablement chahutée depuis quelques années. Othman Benjelloun et Aziz Akhannouch auraient pu contribuer à hauteur de 100 ou 200 millions de DH, cela aurait été important, significatif ; ils ont décidé d’aller au milliard chacun. Il faut leur rendre grâce pour ce geste, et il faut attendre les autres, les suivants, qui feront autant.

L’acte de civisme n’est jamais obligatoire, mais il permet de situer chacun sur l’échelle très complexe du nationalisme, de l’engagement citoyen, de l’action civique. Il serait tellement salutaire pour notre pays que tous puissent contribuer à l’effort national, chacun en fonction de ses moyens, de ses possibilités ; il serait donc opportun de placer à la disposition du public un compte bancaire ouvert à toutes et à tous. On sera très certainement surpris de l’adhésion populaire qui s’en suivra.

Cette crise que l’on espère aussi passagère que peu meurtrière apportera peut-être un peu de cette sérénité qui manque dans notre pays. Et aussi de réconciliation…

Aziz Boucetta



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