(Billet 344) – Finalement, quand l’Etat veut, il peut…

(Billet 344) – Finalement, quand l’Etat veut, il peut…

Il nous aura fallu, au Maroc, juste trois mois pour mettre les choses à plat, pour le meilleur et… en vue du meilleur. L’économie est à l’arrêt, ou presque, la société est sévèrement titillée, la politique est rudement ébranlée, mais dans le même temps, la solidarité sociale a fleuri avec ce qu’elle a de plus beau et de plus noble, l’Etat a montré qu’il sait faire quand il veut et que quand donc il veut, il peut, le génie scientifique marocain a éclaté… Alors, à nous de choisir : on garde les mêmes (habitudes) et on recommence, ou on change ? En bien.

Jusque-là, le Maroc officiel et la société avançaient en quelque sorte sur deux voies parallèles, qui ne se rencontrent jamais. Par Maroc officiel, il faut entendre les pouvoirs publics, les syndicats, la CGEM, les partis politiques, les riches et les puissants, souvent riches… Par société, le reste. Et ainsi avançait la nation, avec ses hauts, ses bas, ses vains combats, ses rustines réformatrices, et son hémorragie de têtes bien faites. L’Etat tenait à sa potion de surplomb et la société était plombée.

Puis survient la pandémie, et là, le Maroc a changé de figure. Les Marocains ont découvert un Etat fort, se sont rappelés que cet Etat a des siècles d’existence et que la légitimité que cela lui procure lui a permis de faire bien des choses et de les faire bien. Nous autres Marocains avons vu ce qui voici juste quelques mois, quelques semaines, était impensable, malgré le pataugeage constaté depuis deux ou trois semaines et en dépit d’une communication de crise en sérieuse crise.

On a parlé digitalisation et on ne savait comment faire ; elle est aujourd’hui là. On a causé de l’informel et on ne savait comment le recenser ; il est désormais connu. On a glosé sur l’enseignement à distance et on a procrastiné ; il est dorénavant sur les rails. On a polémiqué sur la recherche et on tergiversait ; elle est aujourd’hui dans tous les esprits. On a douté de l’industrie, avec raison ; elle a fait des prouesses. On a redouté les banques et on avait raison ; elles montrent aujourd’hui qu’elles peuvent faire œuvre-pie. On a cru en la Commission Benmoussa, et on continue d’y croire, mais si et seulement si elle intègre dans son rapport à venir la nouvelle donne du Maroc post-Covid-19.

Trois mois durant, les Marocains ont supporté les affres d’une politique passée calamiteuse, sans enseignement digne de ce nom, sans système de santé digne tout court. La population s’est appauvrie et se trouve aujourd’hui plongée dans l’incertitude du lendemain, mais elle a été ô combien disciplinée et mobilisée.

Aujourd’hui, on n’a tout simplement plus le choix. L’ancienne gouvernance ne peut se pérenniser dans le Maroc futur. Tant de choses ont été détruites, sauf la certitude de notre capacité à bien faire. Pour cela, une solution peut apparaître, sous la forme d’un débat national sur quoi faire, comment faire, et par qui le faire. La crise a été gérée par les pouvoirs publics, mais rien n’aurait été possible sans la massive adhésion de la population. Rien donc ne saurait être vraiment, utilement et efficacement mis en chantier par les pouvoirs publics sans la population.

Il serait vraiment regrettable de ruiner un tel moment de communion des composantes du pays, en voulant absolument reconstruire ce qui a été détruit, mieux qu’il ne l’était, par la seule volonté et sur la base de la seule réflexion de l’Etat. La société civile, avec ses intellectuels, ses opérateurs économiques, ses scientifiques, ses militants associatifs, ses jeunes peuvent et doivent apporter leur contribution et leur pierre à l’édifice Maroc.

L’appartenance à une nation passe nécessairement par l’implication de toutes et de tous. Nous avons aujourd’hui une belle et unique occasion de le faire. Formons des vœux pour qu’elle ne soit pas, une fois encore, ratée. La génération future le mérite.

Aziz Boucetta

 

 



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