(Billet 356) – Le PJD dans la tourmente

(Billet 356) – Le PJD dans la tourmente

Avec le temps, va, tout s’en va… la nouveauté, l’intégrité, et la morale aussi. Huit ans et demi après son arrivée aux affaires, le PJD se normalise, se banalise. Ses cadres et cadors n’échappent à la règle de l’usure du pouvoir, et de l’attrait aussi pour le confort de ce même pouvoir. Les dernières révélations sur l’un des principaux leaders du parti sonnent comme le tocsin pour ce parti, si l’on peut dire, alors qu’une autre affaire émerge, impliquant un autre ministre de ce parti…

Après plusieurs scandales et/ou affaires de mœurs qui ont secoué la Lanterne et réduit de son éclat rayonnant du début de la décennie, voilà que des informations tombent (dans les deux sens) sur le ministre d’Etat chargé des Droits de l’Homme, ancien ministre de la Justice, qui a employé une dame – aujourd’hui défunte – un quart de siècle durant, sans jamais penser à l’inscrire sur les registres de la CNSS.

L’homme, qui se drape de toutes les vertus, est aujourd’hui confondu comme un vulgaire fraudeur à la législation sociale du travail. Il a dit qu’il n’était pas au courant, alors il eut le bénéfice du doute sur sa bonne foi, comme nous le disions dans un précédent billet. Mais les jours suivants, ses réactions ont transformé ce bénéfice du doute en déroute. Entre dédommagements étalés sur la place publique et laborieux témoignages de proches, arguant de la « responsabilité » de la défunte et dont l’un est légalisé un samedi matin, Me Ramid montre avec une mauvaise foi d’archevêque le peu de cas qu’il fait de la loi, accroché à sa foi et à son absolue ignorance de la logique démocratique, tant il confond l’opinion publique avec une salle d’audience.

Un tribunal fonctionne avec des documents, signés, légalisés… mais l’opinion publique, elle, fonctionne à la perception, et au respect du droit. Or, ce qu’elle perçoit est que le droit a été bafoué par un de ceux qui sont supposés le défendre, et qui prétend le défendre, mais qui aujourd’hui refuse de défendre ce qu’il doit ressentir comme indéfendable. Aucune déclaration publique, aucun statut Facebook…

Pour sa part, le PJD ne semble pas savoir à quel saint se vouer et a entrepris une démarche qui frise le tragi-comique. Il a décidé de déférer Me Ramid – à sa demande, précise-t-il – devant la commission d’éthique dont il est président. C’est certes son vice-président qui mènera les débats, mais que peut-on attendre d’autre d’un président d’une commission d’éthique quand il est lui-même pris en flagrant délit de non-éthique, sinon la démission ? Les explications sensées le disculper l’ont enfoncé, le plongeant dans un bac de sables mouvants où chaque mouvement l’engloutit davantage.

Les faits sont aujourd’hui avérés et aussi têtus que l’est Me Ramid, tant par le document ciselé main de son confrère subordonné que par celui du père de la défunte. L’encore ministre d’Etat avait dit un jour qu’il démissionnerait si les relations sexuelles entre adultes consentants étaient dépénalisées. Autrement dit, si l’Etat détourne le regard des alcôves, il démissionne avec éclat et fracas, mais si l’opinion publique concentre son regard sur ses délits, il ne démissionne pas ! S’il avait fait acte de contrition, s’était excusé publiquement, s’était soumis aux sanctions prévues par la loi, avait dédommagé, en privé, son ancienne employée ou sa famille, puis avait présenté sa démission du gouvernement, les choses auraient pris une autre tournure.

Mais faire état de sa générosité, essayer de sauver sa fonction et faire sonner la charge par d’autres n’a d’autre résultat que de confirmer son non-respect de la loi. Cela est indigne de la part d’un ministre d’Etat qui représente souvent le Maroc à l’étranger pour la question si sensible des droits de l’Homme. Indigne pour lui et dangereux pour le pays…

Pour ne pas avoir réagi dans les 48 heures suivant la révélation de l’affaire, Mostafa Ramid a désormais son avenir derrière lui, et le PJD semble ne pas comprendre que son retard de réaction l’expose lui aussi à l’effondrement de son château de cartes appelé « éthique »… surtout avec cette nouvelle affaire qui entache un autre ministre du PJD, pour les mêmes faits !

Aziz Boucetta

 

 



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